RELATION ENTRE LE BURNOUT ET LES SENTIMENTS DE CULPABILITÉ ET D'AGRESSIVITÉ VÉCUS CHEZ DES VICTIMES
Valérie Jacob
03-2227361

RÉSUMÉ

On observe chez les victimes du « syndrome du survivant », c'est-à-dire les travailleurs qui demeurent à l'emploi suite aux mises à pied massives, une propension à développer un burnout. Cependant, aucune étude n'a été effectuée afin de mieux comprendre le lien qui existe entre ces deux phénomènes. Pour palier à ce manque, cette recherche s'est donnée comme objectif de vérifier la présence d'une relation entre le sentiment de culpabilité vécu chez les « survivants » et le burnout. De fait, en se basant sur la théorie de l'équité d'Adam (1965), les « survivants » devraient percevoir une iniquité positive puisque leurs collègues ont été licenciés, alors que tous offraient le même rendement. Cette iniquité crée un sentiment de culpabilité chez les « survivants », et peut les amener à vouloir augmenter leur rendement afin de justifier leur position. Or, une augmentation de la charge de travail, sans pour autant avoir davantage de ressources, est un facteur lié au burnout. C'est pourquoi la culpabilité est considérée comme étant potentiellement reliée au burnout. Cette recherche veut aussi vérifier la présence d'une relation entre l'agressivité vécue dans le milieu de travail des « survivants » et le burnout. Selon Brockner (1988), il y a une grande incertitude et une ambiance de compétition dans l'environnement des
« survivants ». Ce contexte amène des tensions au sein de l'organisation et provoque des comportements agressifs entre travailleurs. Cette agressivité restreint le soutien social apporté dans le milieu de travail, ressource souvent essentielle pour diminuer les risques de burnout. L'agressivité vécue par les « survivants » peut donc, elle aussi, être en lien avec le burnout. De plus, cette recherche contient une variable contrôle qui est l'estime de soi. Ainsi, deux questions de recherche sont formulées : Existe-t-il une relation positive entre le sentiment de culpabilité vécu chez les « survivants » et le burnout ? Existe-t-il une relation positive entre l'agressivité vécue dans le milieu de travail des « survivants » et le burnout ? Les résultats ne permettent pas d'observer une relation entre la culpabilité et le burnout. En fait, l'instrument mesurant la culpabilité indique que les sujets de cette recherche n'expriment que très peu de culpabilité, ce qui donne aussi peu de variance pour les analyses. Il est possible que cet instrument, qui ne comportait qu'un seul item, n'ait pas permis de bien mesurer le sentiment de culpabilité. D'un autre côté, selon la théorie d'Adam (1965), cela pourrait signifier que les sujets ne percevaient pas d'iniquité positive, ce qui expliquerait que le sentiment de culpabilité soit de faible intensité dans cette étude. L'ancienneté régissant les mises à pied peut avoir contribué à diminuer cette perception d'iniquité. Quant à la relation entre l'agressivité vécue et le burnout, elle a été soutenue par les résultats. Tel que Brockner (1988) le démontrait, le contexte de travail des « survivants » les amène à adopter des comportements agressifs qui diminuent le soutien social. En diminuant ce soutien, on enlève aux travailleurs une ressource qui peut contribuer à les aider à combattre le burnout. On saisit donc un peu mieux pourquoi le burnout est présent chez les « survivants ». L'aboutissement de cette étude incite à poursuivre les recherches sur le lien qui existe entre le « syndrome du survivant » et le burnout. Une meilleure compréhension de cette relation pourrait mener à poser des gestes concrets pour diminuer les risques de burnout chez ces travailleurs.

1er octobre 2001